Agriculture : et si on respectait la diversité ?

Une tribune du secrétaire générale de la FNSEA pour dénoncer le « Comment certains savent mieux que les agriculteurs ce qu’ils ont à faire! »

Le Printemps est la saison où tout pousse, y compris de nombreux ouvrages et autres documentaires sur les meilleures méthodes pour pratiquer l’activité agricole. D’ailleurs, je devrai dire la meilleure méthode ! A longueur de lignes ou d’enregistrements, on explique aux paysans le bon et le mauvais, le faire bien et le faire mal. A défaut d’une vérité toute faite, il est temps de rappeler à nos concitoyens, une réalité bien ancrée : il n’y a pas un modèle agricole en France, une référence unique pour toutes les régions et toutes les productions. C’est un mythe !
Il existe une multitude de modèles, certains disent même 1 000 modèles, en référence aux plus de 1 000 fromages qui sont produits dans notre pays. Cette diversité, c’est la force et l’honneur de nos modèles agricoles.
Il est utile de rappeler que le rôle de l’agriculture française est de nourrir bon et bien. Sortons des discussions de salons et affirmons qu’à chaque modèle son marché, qu’il s’agisse de la restauration hors domicile, de l’export, des repas quotidiens. Chaque jour, les paysans produisent de la qualité et assurent une parfaite sécurité sanitaire.
Sillonnant les départements, je perçois les inquiétudes des agriculteurs qui servent de boucs émissaires aux critiques récurrentes de quelques-uns, dans un Agribashing lancinant. Ceux-là faisant leur beurre à bon compte sur le dos du monde agricole. Attention, je ne dis pas que tout est rose et qu’il n’y a plus d’efforts à faire. Affirmons avec force que ceux déjà réalisés doivent être reconnus, respectés et valorisés, y compris en prix afin qu’ils en encouragent d’autres.
L’Agribashing est une complainte, l’Agriacting est la force de notre quotidien.
Le bio-contrôle est en plein essor, la rotation des cultures est un fait, les cultures sans labour se développent, les couverts végétaux se multiplient, la robotique et le numérique ouvrent de nouveaux horizons.
A force d’inventer des concepts, on en oublie les réalités de chaque exploitation. A la FNSEA, avec un esprit réformiste assumé, nous sommes là pour proposer des solutions. Sur les phytosanitaires, avec 35 partenaires de tous horizons, nous avons avancé un contrat de solutions pour une trajectoire de progrès pour la protection des plantes. Il repose sur 300 solutions techniques, disponibles ou en préparation, pour réduire l’impact de ces produits. Quelle avancée collective ! De plus, nous tendons la main à tous, Etat et ONG, pour le rendre le plus efficient possible. Notre ambition est bien d’inscrire ce contrat dans la durée, car nous préférons les faits et les possibilités aux idéologies ou aux mises à l’index.
La transformation est engagée, les agriculteurs s’adaptent comme ils ont toujours su le faire à condition que les prix se tiennent et que les revenus suivent. L’agriculture biologique est une avancée, l’agriculture urbaine est une idée qui se développe, la permaculture intéresse, se sont autant de modèles qui viennent enrichir la Ferme France. Néanmoins, n’oublions pas que l’agriculture classique nourrit les Français en quantité et en qualité. De plus, les labels et nombreux signes de qualité et d’origine sont là pour nous rappeler que nous sommes le pays de la bonne chère dont la gastronomie est reconnue comme patrimoine mondial à l’UNESCO. Sans chimère, sans veaux d’or nouveau, reconnaissons tous les modèles et faisons-les cohabiter intelligemment, et avancer ensemble !

Et que dire des efforts des éleveurs sur le bien-être animal ! Prise de conscience, recherche, formation, nouvelles pratiques, les éleveurs ont réalisé de vrais changements reconnus par tous dans leurs élevages pour améliorer le quotidien de leurs animaux.
Nous avons inventé le « et en même temps » depuis longtemps : produire en respectant l’environnement, nourrir en respectant les gens, chercher pour l’avenir tout en faisant de la qualité au présent !
La France est un grand et beau pays agricole mais les agriculteurs ont besoin de confiance pour que cette diversité si nécessaire perdure.
Nous plantons des haies, des bandes enherbées au bord des cours d’eau, nous fauchons en effrayant les couvées, nous réalisons des jachères fleuries, partout nous ne cessons de faire le maximum pour protéger faune et flore. Et cela donne de vrais résultats.
La diversité agricole ne se décrète pas, elle se vit, elle se construit dans les règles et dans le temps. Respectée par les acteurs de la chaine alimentaire, garantie par l’Etat et reconnue par les consommateurs, ce peut être une chance pour la France.

Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA

La diversité agricole, elle existe pleinement dans le Morbihan