Le bail de petites parcelles

Stéphane est propriétaire d’une parcelle d’une surface de 40 ares située dans le Morbihan. Il souhaite la donner à bail mais il redoute cette étape. Il ne souhaite pas être soumis au statut du fermage et à son statut si particulier. Il souhaite donc savoir s’il existe une alternative à ce statut ?

Lorsqu’un bail rural est conclu, le statut du fermage est impératif et cette législation si particulière a vocation à s’appliquer. Le statut du fermage impose par exemple une durée minimale de 9 ans, un encadrement du fermage, un droit de préemption au profit du preneur en place, des conditions de renouvellement et de congés pour reprise spécifiques…

Toutefois, tous les baux conclus sur une parcelle agricole ne sont pas nécessairement concernés par ce statut. C’est le cas des baux de petites parcelles (article L411-3 du Code rural et de la pêche maritime) qui échappent au statut du fermage sous 3 conditions :

  • Les parcelles doivent avoir une superficie inférieure au seuil fixé par arrêté préfectoral.
  • Les parcelles ne doivent pas constituer un corps de ferme
  • Les parcelles ne doivent pas être une partie essentielle de l’exploitation du preneur

 

  • Une parcelle d’une superficie maximum

L’article L411-3 du Code rural dispose ainsi que les parcelles agricoles dont la superficie est inférieure à un seuil fixé par arrêté préfectoral pourront bénéficier d’un régime spécial.

D’abord, il faut regarder la surface et la nature des parcelles loués. Il faut également déterminer s’il s’agit d’un corps de ferme ou d’une partie essentielle à l’exploitation agricole ou non.

Dans le Morbihan, l’arrêté préfectoral du 11 mai 2022 relatif à l’application du statut des baux ruraux fixe le seuil maximum des petites parcelles à 50 ares de terres labourables ou de prairies. L’article 5 de l’arrêté précise en outre que :

« Cette superficie maximale est réduite à 25 ares lorsqu’il s’agit :

  • de cultures horticoles, de pépinières fruitières et d’ornement,
  • de cultures maraichères, légumières ou fruitières étant précisé que les cultures légumières s’entendent de cultures de plain champ, soit de pommes de terre de primeur, soit d’artichaut, soit de choux-fleurs, à l’exclusion de tout autre production légumière secondaire ou dérobé
  • de parcelles ayant porté de telles cultures pendant au moins trois années au cours des cinq années calendaires précédant l’année au cours de laquelle application serait demandée des dispositions du présent arrêté. »

Attention, il ne suffit pas de satisfaire au seuil de surface pour pouvoir bénéficier du régime de bail de petites parcelles:

– Le fait de conclure un unique bail sur une superficie supérieure au seuil prévu par arrêté mais dans lequel l’ensemble des parcelles reste inférieures audit seuil constitue un bail soumis au statut du fermage.

– Diviser une parcelle en plusieurs petites parcelles inférieures au seuil maximal contrevient au statut du fermage.

– Ne bénéficie pas de la dérogation, les parcelles ayant fait l’objet d’une division depuis moins de 9 ans dans le cadre d’une succession avec partage de biens loués.

Lorsque les conditions précitées sont remplies, le propriétaire bailleur et le locataire pourront formaliser un bail de petites parcelles et ainsi bénéficier d’un statut « mixte ». En effet, le régime du bail de petites parcelles permet d’exclure partiellement le statut du fermage.

Ainsi,

  • La rédaction d’un écrit n’est pas obligatoire, tout comme la réalisation d’un état des lieux. (Cependant ceux deux formalités sont vivement conseillées).
  • Le prix du bail n’est pas encadré.
  • Le locataire de parcelles ne bénéficie d’aucun droit de préemption. Si le fonds loué est mis en vente, il ne sera donc pas prioritaire vis-à-vis des tiers candidats à l’achat.
  • La durée est librement établie par les parties.
  • Le preneur n’a pas droit au renouvellement du bail (sauf clause prévue dans le contrat).
  • Les modalités de congé sont assouplies : acte d’huissier non requis, respect du délai de 18 mois avant la fin du bail non exigé et le congé n’a pas à être motivé par le propriétaire.

Toutefois, certaines dispositions propres au statut du fermage demeurent applicables au bail de petites parcelles. En cas de litige, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux sera compétent. Les règles en matière de cession et de sous-location du bail et les règles relatives à l’indemnité pour améliorations due au preneur sortant s’appliquent aussi à ces baux. Enfin, les causes de résiliation du bail de petites parcelles sont les mêmes que pour un bail rural « classique » relevant du statut du fermage (Défaut de paiement du fermage, agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds…).

Néanmoins, les parties peuvent tout à faire conclure un bail rural de 9 ans, soumis au statut du fermage sur une « petite parcelle » pouvant bénéficier d’un régime spécial. Dans tous les cas, il est important de formaliser ces conventions par écrit et de prévoir un état des lieux avant l’exploitation du fonds.